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Société de compétition

Alain G

Dernière mise à jour : 11 mai 2019


Depuis toujours ou presque, ils étaient amis, les meilleurs amis du monde, enfin c’est ce qu’ils croyaient. L’amitié résiste-t-elle aux épreuves de la vie, c’est la question qu’ils se posent peut-être encore aujourd’hui.


David et Marc ont fréquenté les mêmes écoles, les mêmes cours de récréation, joué aux mêmes jeux, pratiqué les mêmes sports. Ils étaient inséparables. On les surnommait d’ailleurs les siamois.

En boîte de nuit, ils firent la connaissance de Muriel et en tombèrent tous deux amoureux.

S’en suivi un jeu de séduction qui obligea les deux amis à se faire concurrents dans l’espoir d’être choisis. En peu de temps, les meilleurs amis se transformèrent en meilleurs ennemis.


Laurence et Nathalie étaient collègues et amies depuis leur rencontre. Elles occupaient les mêmes postes et travaillaient dans le même bureau. Elles s’entendaient à merveille et se fréquentaient après le travail, sortaient souvent ensemble. Deux jeunes filles bien dans leur époque et dans leur vie.

Un jour une promotion s’offrit à elles et les mit en concurrence. Nathalie obtint le poste et devint chef de service. Comme par hasard, elles cessèrent de se fréquenter après le travail, Laurence prétextant qu’allant se marier elle manquait de temps pour sortir avec celle qu’elle tenait, disait-elle, toujours pour amie. Mais plus rien n’était pareil. Au bureau, leurs conversations autrefois pleines de chaleur devinrent polies et ternes, comme il convient à deux bonnes collègues. On ne parlait certes pas seulement de la pluie et du beau temps, mais nous n’en étions pas très loin non plus. C’était comme si elles avaient pris un coup de vieux et c’est d’ailleurs comme cela qu’elles vieillirent petit à petit, chacune de son côté.


Tom et Max étaient voisins et bons copains. Après l’école, ils s’amusaient souvent ensemble. Mais Tom était dans les premiers de la classe et Max un peu cancre. Les parents de Tom, craignant que la fréquentation de Max puisse avoir une mauvaise influence sur les résultats de leur fils s’arrangèrent pour que celui-ci n’ait plus l’occasion de voir son copain de voisin sinon très occasionnellement, juste à la dérobée. Puis pour le bien de leur rejeton, ils estimèrent qu’il valait mieux déménager, ce qu’ils firent à la première occasion.

Une amitié d’enfance sacrifiée sur l’autel de la compétition. A n’en pas douter les choses auraient bien différentes si, au lieu d’être parmi les derniers de la classe Max avait été comme son copain parmi les premiers, car se serait alors créée une émulation, un esprit de compétition de nature à rassurer les parents de Tom sur la capacité de leur enfant à ramener de bonnes notes à la maison. Car la carrière commence très tôt. Elle commence à l’école. D’abord il faut avoir de l’ambition, mais il faut aussi aimer la compétition. C’est à cela que sert l’école : à apprendre la compétition. Les connaissances acquises sont secondaires. Le principal est d’avoir de bonnes notes. Les parents demandent rarement à leurs enfants ce qu’ils ont appris à l’école, mais sont très attentifs à leurs classements. On me dira que c’est la même chose, car les notes sont la sanction des connaissances acquises, sauf que je n’y crois qu’à moitié.



La compétition est le moteur de la société. Comme aimait à me répéter mon paternel « Dans la vie, il faut se battre ». Hélas, il avait raison, mais moi ça ne m’intéresse pas de vivre dans une société où il faut toujours se battre. Ça use et on finit par en crever. Malheureusement, il n’y a pas d’autre société que celle-ci où règne comme dans la nature la loi du plus fort. Pourtant, on m’avait appris qu’on entrait en société en sortant de l’état de nature et donc en renonçant à la loi du plus fort. Et moi j’y ai cru, j’ai cru à la coopération comme moteur de la société. J’ai bien sûr été déçu, car les hommes en général aiment se battre. Il n’y a guère plus qu’à espérer que les femmes finissent par renverser cette tendance, mais j’en doute car pour devenir les égales des hommes, n’ont-elles pas plus ou moins l’obligation d’adopter leur mode de fonctionnement, bref de devenir elles aussi un peu des hommes ?






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