On ne naît pas femme, on le devient. C’est le cas d’Axel : il n’est pas né femme, mais l’est devenu … encore que selon lui il n’a jamais cessé de l’être. Il ne lui en manquait juste que l’apparence. La métamorphose ne fut pas simple. Il fallut d’abord obtenir la caution psychiatrique avant de pouvoir procéder à l’opération, puis faire reconnaître ce changement au niveau de l’État civil. C’est ainsi qu’Axelle est devenue officiellement une femme. On lui reconnaissait juridiquement le droit de se marier et d’adopter un ou des enfants … d’être une femme tout simplement. Elle changea de région pour recommencer une nouvelle vie là où on ne la connaissait pas encore, là où elle pourrait être une femme à part entière. Sa chance était d’être menue et d’avoir les traits fins, ce qui lui donnait une véritable apparence féminine.
En tant que femme, elle plaisait aux hommes, d’autant qu’elle soignait vraiment sa féminité jusqu’au bout des ongles. Elle passait un temps fou à s’épiler, se maquiller, se coiffer et prendre soin de son corps, bien plus que la plupart des femmes de naissance.
Elle trouva un travail de secrétaire et fit la connaissance d’Ophélien, un jeune homme de 3 ans son aîné. Très vite, ils emménagèrent ensemble et vécurent comme un couple ordinaire jusqu’au jour où Ophélien se mit à lui poser des questions sur son passé. Axelle ne savait pas quoi répondre. Dire la vérité, c’était s’exposer à la rupture qu’elle ne souhaitait pas, car elle était amoureuse. Mentir, c’était trahir celui qu’elle aimait et avec qui elle voulait faire sa vie.
Elle décida de tout lui raconter dans une lettre qu’elle posta juste avant de retourner passer quelques jours dans sa famille. Ophélien fut évidemment surpris, mais cette courte séparation lui montra qu’il était amoureux d’Axelle et il l’accepta donc assez facilement telle qu’elle était. Ce qui l’ennuyait le plus, c’était finalement de ne jamais pouvoir avoir un enfant d’elle.
Ils reprirent leur vie commune et décidèrent de se marier. Ils organisèrent une grande fête pour célébrer cette union et tout se passa magnifiquement bien. Ils firent un voyage de noces à Venise et en revinrent encore plus amoureux qu’au départ. Ils étaient heureux. Axelle ayant été un homme savait mieux que n’importe quelle autre femme quels étaient les besoins d’Ophélien et les précédaient avant même qu’il ne les exprime physiquement. Ils décidèrent d’adopter un enfant et devinrent les heureux parents d’une petite fille qu’ils baptisèrent Léa.
Axelle et Ophélien vieillirent et Léa grandit. C’était désormais une jeune fille épanouie à qui ses parents n’avaient jamais caché ses origines. Elle leur en était reconnaissante et n’éprouva pas le besoin de chercher à savoir qui étaient ses géniteurs. Elle était très heureuse comme ça entourée de ses parents adoptifs et n’en voulait pas d’autres. Axelle et Ophélien vieillirent encore et Léa se maria et devient à son tour mère de deux petits enfants. Axelle et Ophélien se retrouvèrent seuls et regrettèrent de ne pas avoir eu d’autres enfants, mais ils étaient des grands-parents comblés. Ils continuèrent à vieillir et Ophélien attrapa un cancer dont il succomba. Axelle fut inconsolable. Elle adopta la couleur du deuil et ne la quitta plus. Elle se consacra entièrement à ses petits enfants qu’elle avait la chance de voir régulièrement. Elle travailla encore comme secrétaire jusqu’à l’âge de la retraite qu’elle aurait bien aimé pouvoir remettre à plus tard, ayant peur de s’ennuyer seule chez elle. Elle aurait pu se remarier comme l’y encourageait sa fille, mais fidèle à l’homme qu’elle avait aimé, elle s’en sentait incapable. Tous les jours, elle allait fleurir la tombe d’Ophélien et aspirait secrètement à aller le rejoindre. Elle vécut ainsi encore de longues années et put voir grandir ses petits enfants jusqu’au jour où à son tour elle tomba malade. Elle agonisa durant de longs mois et finit par mourir en ayant eu la satisfaction d’avoir vécu la vie qu’elle avait voulue vivre : une vie de femme tout simplement.
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