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Alain G

Résurrections

La cryogénisation des corps juste après la mort a l’air de faire sinon de plus en plus d’adeptes, au moins d’être un phénomène qui ne semble pas être en perte de vitesse. Imaginons ce qu'il se passerait si, comme l’espèrent ceux et celles qui ont recours à cette technologie, après je suppose plusieurs siècles de congélation, la science ayant suffisamment progressé pour le permettre, il était possible de ramener à la vie celles et ceux qui se seraient ainsi faits cryogéniser.

Comme émettre des généralités à ce sujet serait aléatoire, ma préférence pencherait dès lors plutôt pour l’examen du cas concret de quelques exemples forcément fictifs, puisqu’on entre évidemment là dans un monde qui relève encore à ce jour davantage de l’imaginaire que du réel, enfin me semble-t-il. Et comme je ne souhaite pas étudier tous les cas de figures pouvant se présenter, je me contenterai de ne m’intéresser arbitrairement qu’à deux cas qui pourraient néanmoins recouvrir un spectre assez étendu de l’ensemble des situations susceptibles de se présenter, si cela devait avoir lieu un jour. Je m’intéresserai donc au cas d’un individu isolé, un homme en l’occurrence, mais cela aurait très bien pu être une femme, et à celui d’un couple classique dans lequel l’homme décède généralement avant la femme, ici l’homme décéderait à 70 ans et la femme, plus chanceuse, à 90 ans, pour prendre des chiffres ronds.


Prenons d’abord le cas plus simple, celui de l’individu isolé qui, croyant que la science le pourra tôt ou tard, décide de se faire congeler le plus rapidement possible après son décès.

On part donc du principe que l’individu commence d’abord par mourir, son corps étant ensuite conservé au frais pour une durée indéterminée.

Alors puisqu’on est dans l’imaginaire, supposons que, comme le pense la majorité des gens qui y croient, il aille au paradis, car même les gens qui ont pourtant vécu toute leur existence comme de gros égoïstes sans beaucoup de compassion pour autrui, en n’arrêtant pas de louvoyer tout ce temps entre hypocrisie et malhonnêteté ordinaires, pensent très sérieusement y avoir droit, la chanson de Michel Polnareff, chanteur que j’affectionne plutôt pas mal, le disant au demeurant très explicitement : On y ira tous au paradis. Ce qui voudrait dire donc en somme qu’il n’y a pas d’enfer, même pour les ordures les plus accomplies. Moi bien sûr je n’y crois guère, mais bon imaginons qu’au moins notre individu cryogénisé dont il est question ici y aille, et y reste donc, supposons au moins plusieurs siècles, le temps que la science parvienne à faire revivre les morts. Il y mènerait à priori une vie éternelle dans la félicité la plus absolue, retrouvant au passage sa santé et sa jeunesse, car c’est en général comme ça qu’on se représente le paradis, me suis-je laissé dire.

Et puis voilà que subitement au bout de plusieurs siècles de totale félicité, la science y étant enfin parvenue, son corps serait ramené à la vie. Il serait donc obligé de quitter cette vie qu’il croyait à présent devenue éternelle pour redescendre sur Terre finir d’abord sa vie de mortel ressuscité.

Ayant goûté au bonheur absolu de la vie au paradis, il serait très logiquement tenté d’y retourner au plus vite. Sauf que le suicide fermant la porte du paradis à ceux qui y ont recours, il serait bien obligé d’attendre la fin naturelle de son existence terrestre qui, toutefois, pourrait risquer de ne pas arriver de sitôt, la science, capable à présent de ressusciter les morts, ayant évidemment pendant tout ce temps fait d’énormes progrès en matière de santé et de durée de vie.

Peut-être alors se dirait-il que s’il avait fait don à je ne sais quelles bonnes œuvres de tout cet argent consacré à sa cryogénisation, il aurait pu continuer à demeurer pour l’éternité au paradis, où le cas échéant pour sa bonne action il aurait en outre pu accéder peut-être à une place privilégiée, au lieu de devoir vieillir ici bas, même bien soigné, encore très longtemps.

Bien sûr, je le redis, c’est à priori de la fiction, surtout si on prend en compte le fait qu’on est peut-être, ce que je ne souhaite évidemment pas, en train de vivre la fin du monde.

Si toutefois, on parvenait à éviter cet écueil, et que donc la science avait le temps de progresser suffisamment pour faire revivre les morts dont les corps aurait été congelés, que se passerait-il alors cette fois pour notre couple cryogénisé ?

Eh bien, en admettant que ce couple une fois décédé se serait également retrouvé au paradis à profiter du bonheur le plus total, il devrait très logiquement retourner lui aussi sur Terre tout comme notre individu isolé de l’exemple précédent. Sauf que les choses auraient été un peu différentes dans la mesure où comme je l’ai précisé précédemment la femme serait morte plus ou moins vingt ans plus tard que le mari.

En effet en retournant dans leurs corps respectifs, la femme, qui au départ était plus jeune que son mari quand celui-ci est décédé, serait du coup plus vieille que lui pour être morte vingt ans après que celui-ci soit lui-même passé de vie à trépas, ce qui fait qu’il serait donc du coup devenu plus jeune qu’elle. De quoi selon moi poser un plus ou moins gros problème au monsieur surtout si l’on imagine en outre qu’à la base celui-ci avait toujours eu tendance à préférer les femmes plus jeunes que lui … et tout ceci alors qu’au paradis ils avaient tous deux retrouvés toute leur jeunesse. A mon avis, comme leur fin de vie pourrait fort bien s’éterniser, qui sait s’ils ne finiraient pas par divorcer ici-bas après avoir pourtant vécu si heureux dans l’au-delà ? Un comble non ?

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