Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais dès qu’il y a dans l’actualité un événement susceptible de produire des étincelles, les hommes et les femmes politiques, généralement situés aux extrêmes, se bousculent aux portes des chaînes info pour essayer d’allumer le feu. Mais pourquoi donc ? Parce qu’au fond, à mon avis, ils adoreraient qu’on se mette à nous taper dessus, dans l’espoir (car bien sûr le facteur chance compte pour beaucoup) que le moment venu, ils puissent retirer les marrons du feu qui aurait ainsi été allumé, les marrons symbolisant bien sûr en l’occurrence le pouvoir qu’ils ont tant de mal à conquérir par ailleurs en temps ordinaire.
Car en effet il faut bien l’admettre, on dirait de plus en plus qu’un air de révolution semble se répandre dans nos sociétés occidentales en crise. Cela voudrait-il dire que ces sociétés n’arrivent plus ou pas suffisamment à évoluer, en tout cas dans le bon sens ? Et si oui quelle direction devrait donc prendre cette évolution pour éviter la révolution qui se montre de plus en plus pressante à nos portes ? Bien malin qui pourrait le dire sans risquer de se tromper.
Et puis une révolution dans quel but ? En général, après une révolution, c’est un régime fort qui se met en place, c’est-à-dire en fait une dictature quelle que soit sa forme, rarement, voire jamais une démocratie qui reste pourtant à ce jour le moins pire des régimes politiques, non pas que les démocraties soient forcément plus vertueuses que les dictatures, puisqu’il y a probablement par exemple autant de corruption dans un cas que dans l’autre, mais au moins y a-t-il en démocratie une presse libre en mesure de la dénoncer. Car sinon, penser qu’on pourra en changeant de régime politique lutter contre ce fléau, c’est nier ce que nous sommes vraiment tous plus ou moins. En effet, que l’on demande aux gens en général s’ils sont contre la corruption, et vous ne trouverez évidemment personne pour dire qu’il est pour, alors que les mêmes sont peut-être les premiers à aller voir leur maire ou leur député pour obtenir un passe-droit, un emploi ou un logement pour leur fils ou leur fille, ou encore pour que leur dossier soit placé en haut de la pile, quand ça n’est pas pour faire sauter leur amende de stationnement ou autre PV qu’ils ont à payer. Car oui n’en déplaise, ça aussi c’est déjà de la corruption.
Quoi qu’il en soit, d’aucuns pensent néanmoins qu’un despote éclairé pourrait faire bien plus que n’importe quel gouvernement démocratique. Personnellement, je demande à voir, ou plutôt en fait à ne pas voir, car on en parle souvent mais qui serait vraiment capable de citer un seul exemple historique de despote éclairé ayant fait ses preuves au cours des siècles et même des millénaires écoulés ?
Moi je n’en connais guère. On fera sans doute référence à Atatürk parce que celui-ci est parvenu autoritairement à imposer à son pays une occidentalisation à marche forcée. Mais de toute façon aujourd’hui l’occident n’a plus autant la cote qu’à cette époque, et ce serait plutôt à une désoccidentalisation à laquelle on pourrait même bien assister si des troubles de nature révolutionnaires venaient à survenir.
Alors dictature de droite ou de gauche, c’est-à-dire somme toute un Etat policier, est-ce vraiment cela que les révolutionnaires souvent en herbe aimeraient voir advenir pour eux-mêmes et leurs enfants ? Car souvent quand on est jeune on rêve de changer le monde, et on a alors généralement en soi une représentation très idéalisée de la révolution, qui dans la réalité n’est pourtant ni plus ni moins qu’une guerre civile, qu’on appellera d’ailleurs généralement de cette manière quand le pouvoir en place vient à bout des révolutionnaires, tandis que c’est seulement dans le cas contraire qu’on parlera de révolution.
Alors qu’il soit accidentel ou même parfois intentionnel, comme ce fut le cas du Reichstag dans les années trente, doit-on se préparer, au moins intellectuellement, à éteindre l’incendie auquel de plus en plus de pyromanes rêvent, certains sans même plus s’en cacher ?
La seule consolation que j’ai en ce qui me concerne quand je me mets à y penser, c’est qu’heureusement je n’ai pas d’enfant qui aura à vivre ça si ça devait arriver.
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