Tous les garçons se masturbent quand la puberté vient chambouler l’équilibre hormonal des enfants qu’ils étaient. Et s’ils ne le font pas, à mon avis, il y a comme un problème. En tout cas moi, tous les copains de mon âge de cette époque se masturbaient ou alors mentaient en disant faire ce qu’ils ne faisaient pas. Tous ceux que je côtoyais, mais peut-être ne fréquentais-je que de mauvais garçons, disaient le faire ou l’avoir fait. Il faut dire que cela aurait été la honte vis-à-vis des autres si l’un d’eux avait prétendu être chaste et vouloir le rester. C’était comme ça, en tout cas à mon époque, et à mon avis ça l’est toujours. Les filles, je ne sais pas, puisque n’en étant pas une, je n’ai donc jamais vécu cette expérience en tant que telle. Pour le savoir il faudrait le leur demander, encore qu’à ma connaissance elles n’aiment guère en parler. Bien sûr, en se masturbant tous les garçons s’imaginent faire l’amour avec la fille de leurs rêves (ou le garçon de leurs rêves, pour les homosexuels qui s’assument), et font d’ailleurs tout dans la réalité pour réaliser ce rêve. Mais dans la réalité, les choses sont beaucoup plus difficiles et certains préfèrent même parfois rester dans le rêve, en continuant à se masturber plutôt que de se contenter d’une réalité médiocre et décevante, ceci n’empêchant évidemment pas par ailleurs des rapports « classiques » avec leur partenaire, mais enfin ils prennent vraiment mieux leur pied par la masturbation en fantasmant sur celle (ou celui) que dans la réalité ils savent être incapables d’avoir. Cependant, passé un certain âge, si cela se fait encore cela ne se dit plus, sauf en plaisantant. Il y a comme une honte à l’avouer. Au mieux on en rigole, au pire c’est une insulte : branleur ! Pourtant, si on apprenait aux petits garçons à ne pas en avoir honte, voire même à l’encourager pour contrarier le passage à l’acte chez ceux dont les fantasmes sont pervers (viol, pédophilie …), cela ne s’avérerait-il pas au bout du compte moins dommageable pour tous ? Expliquer aux petits garçons (je ne sais pas pour les filles) au lieu de les culpabiliser, que dans la réalité il y a des choses qui ne se font JAMAIS, mais, qu’en se masturbant autant qu’ils le veulent, ils peuvent ce faisant fantasmer sur tout ce dont ils ont envie, à condition qu’une fois de retour dans le monde réel ils se plient à nouveau aux règles de celui-ci, les choses n’iraient-elles pas mieux ? Mais on ne le saura jamais, car jamais on ne le fera. C’est tabou.
Philibert était fonctionnaire, marié, deux enfants. C’était un bon mari et un bon père. Mais il le savait depuis toujours, il n’était pas normal : il ne jouissait vraiment qu’en maltraitant les femmes. Il savait d’instinct que dans la vie cela ne se faisait pas, et d’ailleurs dans la vie, il était doux comme un agneau. Personne n’aurait pu imaginer dans son entourage qu’il pouvait avoir de tels désirs. D’ailleurs, sa femme l’ignorait et l’aurait quitté, il en était persuadé, si elle l’avait su. Il n’ignorait pas qu’il existait des femmes qui aiment qu’on les malmène, mais ayant déjà essayé avec quelques unes d’entre elles en étant plus jeune, il savait qu’elles avaient des exigences qui le contrariaient. Elles voulaient en effet qu’on les batte pour pouvoir jouir, alors qu’au contraire il aurait préféré les savoir effrayées à cette idée. Bref, il était vraiment sadique. De temps en temps, car bien qu’à l’aise financièrement, il ne roulait néanmoins pas sur l’or, il allait voir une prostituée qu’il prenait le soin de choisir pas du tout masochiste, de sorte qu’elle acceptait par appât du gain sans toutefois y prendre le moindre plaisir. Là, enfin, il jouissait pleinement.
Mais il était marié et père de famille, et ne pouvait se permettre ce genre d’extra qu’à de très rares occasions. Avec sa femme, il avait des rapports d’une très grande banalité qui ne le satisfaisaient que très moyennement, même s’il n’en laissait rien paraître. Parfois, au cours de ses rapports avec sa femme, il s’évadait dans ses fantasmes au point même de lui arriver dans le feu de l’action d’être légèrement brutal au grand dam de sa femme auprès de qui il s’excusait aussitôt prétextant un moment d’égarement ou autre baliverne. Mais le plus souvent, en cachette, il allait s’enfermer dans la salle de bains pour pouvoir se masturber en fantasmant sans limite sur des scénarios sophistiqués dans lesquels il pouvait donner libre cours à son penchant indicible. Certes, n’étant plus un jeune homme, il fallait, quand cela arrivait, délaisser un peu son épouse, le fusil mitrailleur qu’il avait jadis s’étant en effet avec le temps transformé en fusil à un coup qui demandait à présent un certain temps avant de pouvoir être rechargé. Mais c’était un besoin, je dirais physiologique, dont il ne pouvait se passer. Il n’avait pas choisi ses fantasmes, ils s’étaient imposés à lui. Et depuis, il composait avec eux. Il aurait préféré être « normal », mais il était ce que la nature avait bien voulu faire de lui. Alors il s’en accommodait et vivait de temps à autre ces petites parenthèses entre savons, shampooings et serviettes de bains. C’est ainsi qu’il trouvait son équilibre lui permettant en retour de pouvoir faire parfaitement illusion en société et ainsi mener la vie de famille à laquelle il aspirait, et sans laquelle il n’aurait pas été complet, s’autorisant juste de temps en temps quelques séances masturbatoires à la dérobée. Somme toute, rien d’extraordinaire pour qui a compris que dans la vie il fallait bien faire la distinction entre ce qui relève de l’imaginaire et ce qui est permis dans la réalité.
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