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Dans le bon sens du terme

Alain G

Dernière mise à jour : 23 févr. 2022

C’était au temps où j’étais fonctionnaire territorial. J’avais passé un concours parmi d’autres à l’époque où je devais faire mon service national. Je ne voulais pas le faire, et mes parents étant divorcés je pouvais espérer en être exempté comme soutien de famille. Ce concours, c’était celui de commis, aujourd’hui adjoint administratif. Je croyais qu’une fois obtenu, il suffisait d’attendre qu’un poste se libère pour être embauché. Je suis tombé de haut, car le concours n’ouvrait droit en fait qu’à figurer sur une liste d’aptitude dans laquelle les maires et autres employeurs publics territoriaux venaient piocher en cas de besoin, sachant qu’un maire en général préférera toujours engager un fonctionnaire parmi ses connaissances qu’un inconnu qu’on viendrait lui imposer de l’extérieur. Je ne critique pas, je constate. C’est vraiment quand il ne peut pas faire autrement qu’il a recours à cette liste d’aptitude et ce fut mon cas, mais plusieurs années après avoir obtenu le concours en question. Entre temps, j’avais repris mes études et décroché une licence en droit. J’avais oublié ce concours quand un jour je reçus une lettre de la mairie me proposant un poste. Je ne savais que faire. Devais-je accepter le temps de trouver mieux, sachant qu’en attendant je n’avais rien, ni voiture pour me déplacer, ni offre d’emploi sur laquelle m’appuyer. J’ai finalement décidé d'accepter et après un passage de plus ou moins un an au bureau d’aide sociale, j’ai fini par intégrer non sans mal le secrétariat général où j’ai beaucoup appris, mais aussi beaucoup travaillé. Je faisais office de service juridique à moi tout seul et je dois dire que ça ne me déplaisait pas, car c’était intéressant dans la mesure je pouvais enfin mettre en pratique les connaissances théoriques acquises sur les bancs de la fac, même si je n'étais pas payé en conséquence, loin de là. J’espérais que le secrétaire général comprendrait la situation, en parle au maire et me propose d’y remédier par le biais d'un contrat comme cela aurait pu se faire. Je n'aurais en effet eu aucune réticence à quitter mon statut de fonctionnaire, si c'était pour gagner plus. Mais non, Il préférait que je passe le concours d’attaché. Or j’avoue que je n’étais pas très chaud à l’idée de me replonger dans mes cours pour préparer ce concours, une fois rentré chez moi après mon travail au bureau. Et puis d’ailleurs, une fois obtenu, à supposer bien sûr que je l’obtienne, car, sauf preuve contraire qu’à ce jour j’attends encore, il n’y a pas de concours facile, d'autant plus que je n'étais pas du tout, et ne suis sans doute toujours pas, comme certains peuvent l'être, une bête à concours, les diplômes me semblant par ailleurs déjà largement suffisants sans qu'il faille en plus un concours, qui de toute façon ne m'est jamais apparu comme une garantie infaillible de compétence (*), … et ceci d’autant que même ce concours obtenu rien n’aurait obligé le maire à me recruter en fin de compte à ce grade. Il aurait tout aussi bien pu prétexter qu’aucun poste correspondant à ce niveau n’était disponible pour m’envoyer balader. Ça peut en effet se passer comme ça dans l’administration, et l'administration territoriale en particulier, mais aussi partout ailleurs où il y a toujours eu des placards pour celles et ceux dont on ne veut plus. J’ai donc continué à m’occuper des marchés publics, des assurances et autres acquisitions d’immeubles en cherchant parallèlement mieux ailleurs. Cette recherche était devenue un impératif le jour où le secrétaire général un peu plus volubile que d’habitude avoua ses intentions à mon égard : « Toi, il faut qu’on t’exploite au maximum… mais dans le bon sens du terme bien sûr », me dit-il en souriant d’un air affable. Car bien sûr, il y a toujours un bon sens du terme quand il s'agit exploiter quelqu’un, n'est-ce pas ?


(*) N’avons-nous pas en effet tous pu constater un jour avec nos profs au collège ou au lycée dont certains bien qu'agrégés étaient nuls, alors que d'autres pourtant simples remplaçants, et donc profs sans concours, preuve au demeurant par conséquent qu'on peut très bien faire office de prof sans avoir de concours, avaient bien plus de pédagogie que beaucoup de professeurs titulaires ?

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