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Alain G

Haro sur le porno

Dernière mise à jour : 30 janv. 2023

Sous prétexte que les jeunes, qu’on doit bien sûr protéger, sont exposés via les réseaux sociaux à des images violentes, dégradantes (il faudrait encore se mettre d’accord sur ce à quoi on pense exactement quand on parle d’images dégradantes, parce qu’à mon avis ce n’est pas la même chose pour tout le monde) ou pédopornographiques (raison souvent invoquée par les ennemis jurés du porno), il faudrait urgemment établir une nouvelle prohibition, à côté de celle relative aux substances stupéfiantes, pour tout ce qui pourrait s’apparenter à de la pornographie.

D’abord, pour ce qui est de la pédopornographie, il y a fort peu de chance que les jeunes qui ne sont pas sexuellement attirés par les enfants s’y attardent, ou que ces images puissent être de nature à les transformer en pédophiles s’ils n’avaient pas déjà en eux ce penchant. A la rigueur, pourraient-elles la leur révéler, à condition qu’elle fût déjà latente au plus profond d’eux. Car je ne crois pas en effet qu’on puisse suggérer une perversion à quelqu’un qui ne serait pas pervers déjà à la base, tout comme je n’arrive pas à imaginer qu’on puisse encourager un hétérosexuel pur et dur à devenir homosexuel (ou inversement) en montrant l’homosexualité, par le biais notamment de la pornographie, sous un jour favorable. Là, on est carrément dans l’absurde. Et pourtant apparemment c’est un argument qui étrangement semble être opérant chez de nombreux prohibitionnistes.

Curieusement aussi, pour ces gens-là, les images ultraviolentes pouvant circuler sur les réseaux sociaux, et auxquelles les jeunes peuvent donc également avoir accès, semblent moins problématiques que les images pornographiques qui les horripilent, de la même manière que, chez les gens (bizarrement souvent d’ailleurs les mêmes) qui sont opposés à l’avortement au nom du respect de la vie, on en trouvera peu parmi eux qui, toujours au nom du respect de la vie, seraient prêts à s’opposer à la peine de mort.

Les jeunes, dont les prohibitionnistes prétendent se soucier, ont pourtant besoin, me semble-t-il, d’au moins un peu de porno pour se forger une éducation sexuelle, qui leur est refusée par ailleurs. En effet, les parents en général sont gênés de parler de ça à leurs enfants, et les enseignants estiment souvent que ce n’est pas à eux de s’en occuper, car à moins d’être spécialisés dans ce domaine de manière à pouvoir l’enseigner à temps plein comme n’importe quelle autre matière, pourquoi certains professeurs, fussent-ils de sciences naturelles, devraient-il s’y coller à raison au mieux de quelques heures dans l’année, alors qu’on leur en demande toujours plus à côté de leur mission principale qui est, ne l’oublions pas, d’enseigner la matière dont ils sont censés avoir acquis la maîtrise au cours de leurs études ? Éventuellement pourrait-on envisager que certains d’entre eux puissent suivre un stage de formation pour acquérir cette compétence particulière, afin de pouvoir la transmettre à leurs élèves. Sinon en quoi un professeur, quand bien même ce serait un professeur de sciences naturelles, pourrait-il être plus qualifié que n’importe quel parent pour aborder ce sujet avec les jeunes qui suivent ses cours ? Un professeur de science naturelle a certes étudié la reproduction des animaux et est donc capable de l’enseigner à ses élèves, mais n’avez-vous pas remarqué que nous n’étions plus vraiment des animaux, et que notre sexualité est un peu plus complexe que celle des autres espèces du règne animal ?

Si les jeunes se tournent vers le porno, c’est parce que le porno est le seul à pouvoir leur offrir ces images crues qu’ils recherchent notamment pour pouvoir se rassurer. Ils ou elles se posent tellement de questions (d’abord sur leur anatomie intime) et ne trouvent de réponses, peut-être pas toujours adaptées, qu’avec le porno. Les garçons se demandent souvent si leur verge est normale, et certaines filles, m’a-t-on dit, ont recours à la chirurgie esthétique pour corriger l’apparence de leurs petites lèvres qu’elles trouvent trop ceci ou trop cela. Ils ou elles ont besoin de références pour pouvoir se construire et s’accepter. Et si on ne veut pas que ce soit le porno qui s’en charge, pourquoi ne leur mettons-nous pas à disposition de telles images dans le cadre de sites officiels gérés par des spécialistes reconnus pour leurs compétences, pour qu’ils n’aient pas à aller chercher ailleurs ce qu’ils pourraient trouver sur ces sites qui sans être pornographiques n’en seraient pas moins des sites montrant les choses comme elles doivent être montrées, c’est-à-dire en fait au besoin crûment. Mais, je crains que seuls les gens qui travaillent dans le porno, ou à la rigueur des artistes un peu marginaux, ne soient capables de ce genre de choses.

Quand j’étais jeune (et à fortiori quand j’étais enfant), il n’y avait pas de réseaux sociaux, mais il y avait des magazines porno qu’on étaient nombreux à vouloir consulter, si ce n’est en fait tous les garçons que je connaissais qui rêvaient d'en feuilleter. On voulait tous voir des femmes à poil, comme on disait.

J’imagine que les homosexuels, eux, regardaient plutôt les photos de garçons dénudés sans rien dire, tout comme sans doute les pédophiles, qui ont toujours existé, regardaient des photos qui laissaient en revanche totalement indifférents tous les autres garçons du même âge. Je ne crois pas que les réseaux sociaux ont amplifié le phénomène, mais l’ont assurément révélé dans toute son ampleur. Je crains hélas qu’il était bien trop sous-estimé avant que les réseaux sociaux ne le fasse apparaître au niveau qui est véritablement le sien. Avant, on balayait tout ça sous le tapis, alors qu’aujourd’hui ça éclate en plein jour. Le mal, je crois, a toujours été plus grand, mais on ne voulait pas le voir. Et je ne crois pas qu’il ait augmenté. Il est, je pense, toujours plus ou moins le même qu’avant.

Attaquer le porno, mettre une chape de plomb sur tout ce qui est sexuel, n’empêchera pas les perversions d’exister au sein des cellules familiales ou cercles d’amis par exemple.

Il me semble qu’il serait plus judicieux de prendre le temps de mieux informer, d’éduquer, de mettre en garde les enfants dès l’école primaire sur les dangers des réseaux sociaux, de les guider au travers des méandres de ces outils qu’à mon avis personne ne parviendra jamais à maîtriser parfaitement. Il y aura toujours des risques à les utiliser, tout comme il y en a à prendre sa voiture et rouler sur les routes et les autoroutes. On ne peut, je le crois, que mieux apprendre aux enfants dès leur plus jeune âge à bien se servir des réseaux sociaux et éviter leurs pièges. Il faut leur apprendre à faire attention à ces nouveaux dangers, comme jadis dans un autre registre on apprenait aux jeunes enfants à faire attention au loup, sauf qu’aujourd’hui la société est devenue infiniment plus complexe et qu’on se sent largement dépassé par tout ça. D’aucuns, comme souvent diront que c’était mieux avant. Avant il n’y avait pas en effet de réseaux sociaux, mais avec ce genre de raisonnement avant il n’y avait pas non plus d’eau courante ni d’électricité. Était-ce vraiment mieux ? D’autant que les perversions ont toujours existé, et d’ailleurs à mon avis dans les mêmes proportions que de nos jours. Qu’en outre, on aura beau dire ou beau faire, je crains qu’une perversion ne se guérisse guère. Tout au mieux peut-on apprendre à vivre avec, le moins mal possible.

Peut-être serait-il possible de limiter les risques en obligeant quiconque voulant circuler ou naviguer sur Internet à passer un permis au préalable, encore que des conducteurs roulant sans permis il y en a toujours eu. Peut-être pourrait-on aussi contraindre tout détenteur de smartphone à suivre un stage de formation avant de pouvoir l’utiliser, mais de toute façon ça n’empêchera pas les dangers d’exister, de la même manière que le permis de conduire en voiture n’a jamais empêché ceux qui le souhaitent de mal se conduire au volant de leur véhicule. Certes, les dangers au guidon d’un vélo étaient-ils moins grands qu’au volant d’un bolide pouvant aller à plus de 130 km à l’heure. Oui, mais au guidon d’un vélo on mettait aussi beaucoup plus de temps pour se rendre d’un endroit à un autre. Il faut savoir ce qu’on veut, ou ce qu’on ne veut pas, et en assumer les conséquences, voilà tout !

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