L’Homme propose et la Femme dispose était en gros jusque-là la règle non dite, et bien sûr non écrite, qui s’appliquait dans les rapports de séduction entre les deux sexes, ce qui se traduisait dans les faits d’une manière très large et schématique, voire caricaturale, par le fait qu’il revenait aux hommes de draguer et aux femmes de choisir. Sauf que voilà, de plus en plus de femmes qui se font draguer, il faut le reconnaître parfois, voire souvent de façon grossière et maladroite, quand ça n’est pas tout simplement de façon agressive, se sentent maintenant harcelées par ces dragueurs primaires, à qui visiblement personne n’a songé un jour à leur apprendre les bonnes manières. Mais tout le monde, il est vrai, n’a pas eu la chance de recevoir une bonne éducation, et peut-être même que cela aurait tendance à se perdre de plus en plus, les débats portant sur les causes de cette dégradation étant innombrables. Et s’il est vrai que ce problème d’éducation irait en augmentant, alors ce sentiment d’être harcelées devrait tout naturellement aller lui aussi en s’aggravant.
Alors n’y aurait-il rien à faire pour y remédier ?
D’aucuns proposent de mettre le paquet sur l’éducation, sauf que les professeurs et instituteurs ont déjà beaucoup à faire avec les missions traditionnelles qui leur sont attribuées, à savoir bien sûr principalement apprendre à lire, écrire et compter. Et quand on sait que chaque année de nombreux élèves sortent du système scolaire sans maîtriser aucun de ces savoirs de base, le cas de ces élèves relevant sans doute davantage de professionnels du genre orthophonistes ou autres que de l’enseignement en général, on peut se demander très légitimement s’il serait vraiment pertinent dès lors de charger encore plus la bête, au lieu au contraire de la décharger de tâches peut-être accessoires du genre, par exemple, l’apprentissage par cœur de dates historiques, si ça se fait toujours bien sûr, alors qu’à titre personnel comme beaucoup je n’en ai guère retenue qu’une seule, à savoir bien évidemment Marignan, c’est 1515, et je me demande bien pourquoi.
D’autres diront que ce n’est pas aux profs et instits de faire le travail des parents, mais dans ce cas là que faire ? Beaucoup alors auraient tendance à vouloir priver les parents qui ne remplissent par leur mission éducative des allocations familiales dont ils sont bénéficiaires, sauf que cela revient concrètement à mettre très souvent des familles déjà précaires dans encore plus de précarité. Alors peut-être songera-t-on un jour à interdire aux adultes aspirants à devenir parents de se reproduire, s’ils ne possèdent pas au préalable le minimum d’éducation indispensable à transmettre à leur progéniture, ou à mettre en place une sorte d’école des parents et non plus des enfants, ou un système de stages ou de cours du soir pour pallier aux défaillances de ces parents (*). Mais j’en doute fort, et d’ailleurs le remède pourrait très bien au final être pire que le mal. A moins que, qui sait ?
Alors puisque, apparemment, on est dans le flou le plus complet, en ce qui me concerne, je me demande, afin d’apporter ma modeste contribution à ce vaste débat, s’il ne serait pas bon à présent d’envisager un renversement ou une inversion de la règle dont je parlais au début, à savoir que désormais ce serait à la Femme de proposer et à l’Homme de disposer. Bien sûr c’est un clin d’œil car évidemment ça n’arrivera jamais. Mais si cela se produisait quand même, qui sait dans un avenir proche ou peut-être lointain, cela aurait au moins pour mérite de supprimer ne serait-ce qu’un peu ce sentiment d’être harcelées qu’ont de plus en plus de femmes aujourd’hui. Ça obligerait certes les femmes à draguer, ce que je crains elles n’apprécieraient guère, mais cela permettrait néanmoins de vérifier si les femmes sont en fin de compte plus douées que les hommes dans ce domaine, à moins qu’elles s’avéreraient être en définitive aussi maladroites que les hommes, qui seraient en conséquence légitimes à s’en plaindre. Voilà qui serait drôle. S’apercevant alors que draguer ce n’est pas si facile, peut-être voudraient-elles retourner à l’ancien système, alors que les hommes s’étant habitués au confort du nouveau modèle refuseraient d’y revenir. Ce serait vraiment amusant, mais hélas c’est sans doute quelque chose que je ne verrai jamais, vu mon âge déjà bien avancé. Rire.
N’empêche qu’à l’heure où les dragueurs sont de plus en plus considérés par nombre de draguées comme des harceleurs, il ne serait peut-être pas idiot au moins de commencer à se demander s’il ne faudrait pas à présent changer de paradigme en la matière, ou plus exactement s’il ne serait pas souhaitable désormais d’inverser tout simplement le paradigme actuel, à savoir l’Homme propose et la Femme dispose, et de le remplacer par son contraire.
(*) Si toutefois c’est bien à eux que revient réellement la responsabilité de la situation actuelle. Et si en effet, tout cela n’était en définitive que le résultat de la violence générale qui règne dans la société à laquelle nous appartenons, et à laquelle nous contribuons tous, chacun proportionnellement à la place qu’il y occupe ?
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