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Para dit l'enfer

Alain G

Dernière mise à jour : 16 juil. 2023

Para n’avait rien de militaire, à part sa coupe de cheveux qui lui valait parfois d’être traité de skin head ou rangé parmi les fachos. Or quand on le connaissait, on savait qu’il avait sûrement tout sauf ces idées-là. Sans avoir la naïveté d’être antimilitariste, il était quand même un peu rebelle. Mais les gens aiment bien classer les autres selon leur apparence, car pour eux contrairement au dicton l’habit fait bel et bien le moine. Para, lui ne portait pas ses idées sur la tête, mais les cultivait bel et bien dans la tête. Et dans sa tête, il y en avait des choses. Je me souviens de la fois notamment où il nous évoqua sa foi, au cas où il y en aurait un, sur ce que pourrait être le paradis, c’est-à-dire quelque chose qui ressemblerait plutôt à l’enfer !

Je ne sais pas vous, disait-il, mais moi j’aime bien en général Michel Polnareff , sauf peut-être sa chanson où il dit qu’on ira tous au paradis. Franchement, vous y croyez vous qu’on peut tous aller au paradis, s’il existe ? Moi, j’ai beaucoup de mal à y croire. Ça voudrait dire par exemple que quoi qu’ils aient fait les tortionnaires se retrouveraient au paradis en compagnie de leurs victimes, que les nazis et les juifs qu’ils ont exterminés cohabiteraient au paradis comme si de rien n’avait été. Moi, je sais bien en tout cas, rancunier comme je suis, si jamais, paradis ou pas, je me retrouvais en présence de mon bourreau, je n’aurais qu’une seule envie : le faire payer pour ce qu’il a fait et obtenir justice ! Un paradis pareil deviendrait vite un enfer, vous ne trouvez pas ? A moins bien sûr qu’ils y aient plusieurs paradis, un pour les tortionnaires et un pour leurs victimes, sauf que si pour les victimes le paradis se trouve là où ne sont pas leurs bourreaux, pour les tortionnaires dans l’âme au contraire un paradis sans victimes à torturer, ce serait plutôt l’enfer. Quoi qu’il en soit, s’il y a bien un paradis et si celui-ci est unique, il y a forcément aussi un enfer. Et quand je jette un regard sur l’Histoire de l’Humanité, je me dis qu’avec toutes les guerres et autres horreurs commises au fil des millénaires, l’enfer, s’il existe, doit sûrement être bien plus rempli que le paradis. En comparaison, je dirais même que par rapport à l’enfer, le paradis n’est peut-être qu’un vaste désert. Non, franchement s’il y a un enfer et un paradis, ça serait de mon point de vue plutôt une sorte de système avec une infinité de niveaux et en fonction de ce qu’on a fait au cours de sa vie, on viendrait étoffer tel ou tel niveau entre l’enfer absolu que je n’arrive même pas à me représenter, et le paradis suprême dont j’ai autant de mal à imaginer ce qu’il pourrait être réellement. Mais bon, tout ça suppose bien sûr de croire en l’existence de l’âme. Pour moi, l’âme c’est juste ce qui anime, ce qui rend animé ce qui sans cela resterait inanimé, bref ce qui rend vivant en gros. Autrement dit, tout ce qui vit a une âme qui bien sûr logiquement n’a pas la même envergure selon qu’on est homme, ver de terre ou autre microbe. Pour Spinoza en tout cas, dont je ne sais franchement pas s’il serait d’accord avec ma définition de l’âme, de deux choses l’une : soit l’âme est reliée à Dieu et auquel cas elle est éternelle, soit elle est reliée au corps et dans ce cas, elle est mortelle. Mais pour lui, c’est évident elle est éternelle. Moi personnellement, cette évidence ne me saute pas aux yeux, mais je crois quand même qu’il doit plutôt avoir raison, car l’âme, si elle existe, ne vient pas du néant, et ne venant pas du néant j’ai du mal à concevoir qu’elle puisse retourner là d’où elle ne vient pas.

De toute façon ce qui est sûr, c’est que ce que l’homme sera sans doute capable de faire un jour dans plusieurs siècles ou millénaires, la nature, elle, en est certainement capable depuis toujours : je pense en effet que l’homme devrait être capable un jour, si la nature lui en laisse le temps, de transférer l’activité cérébrale d’un individu sur ou dans un support extérieur au corps, et ainsi de le rendre quasiment immortel. La nature évidemment le fait peut-être déjà aussi, si sa volonté est de sauvegarder tout ou partie de l’intelligence ou de la sensibilité des individus qui auront permis à cette intelligence ou cette sensibilité d’exister. Mais la question qui se pose, quand on sait que la 6ème extinction de masse a probablement commencé et qu’il sera sûrement très difficile de l’enrayer, voire impossible, sauf s’il y a un miracle : avons nous ce temps ? Je crains hélas que non, et que nous disparaîtrons comme c’est arrivé plusieurs fois dans le passé à de nombreuses espèces, sauf que là apparemment, ce sera nous-même qui par bêtise et cupidité aurons coupé la branche sur laquelle nous étions assis. Finalement, il semble bien que la fin du monde si souvent annoncée va effectivement avoir lieu puisque, sauf miracle, elle a bien l’air d’être visiblement en cours. On voyait la fin du monde en l’an 2000 avant qu’un film à succès ne la situe en 2012, on l’imaginait donc sous la forme d’une date, alors qu’il fallait l’envisager comme une durée s’étalant sous nos yeux, durée qui un jour aura en principe une fin, sauf miracle bien sûr. Un miracle, ça pourrait être par exemple une inversion de polarité du globe qui pourrait bien se produire qui sait bientôt et à laquelle certains associent l’émergence d’une nouvelle ère glacière, ce dont je doute mais qui ferait par le plus heureux des hasards, si cela s'avérait exact, que le réchauffement climatique que nous aurions provoqué s’en trouverait atténué par cette glaciation providentielle. En effet, en mélangeant du chaud avec du froid, on a toujours obtenu du tiède, pas vrai ? Mais là, ça dépendrait de la seule bonne volonté de la nature, et rien nous dit qu’elle ait vraiment envie de nous sauver, car en toute honnêteté, le mériterions-nous ? Et puis après tout, si nous devons disparaître, ce n’est pas si grave, car tôt ou tard la vie devrait finir par renaître. Pas avant toutefois sans doute plusieurs dizaines ou centaines de milliers d’années, mais hélas certainement sans nous, à moins encore que prochainement notre système économique ne s'effondre totalement, ce qui mettrait ainsi fin du coup à toute pollution de masse et empêcherait le funeste processus d’aller à son terme. Sinon de toute façon n’a-t-il pas toujours été prévu que tout ce qui vit finirait par mourir un jour ? La mort en tout cas trouverait chez l’insomniaque que je suis, qui a toute sa vie couru après le sommeil, un accueil favorable si cette mort s’apparente effectivement au sommeil que j’espère bien éternel, car jamais plus en ce qui me concerne, s’il faut mon accord pour cela, je n’accepterai de vivre à nouveau. La vie en effet, j’ai assez donné, sauf si ce qu’il y a éventuellement après pouvait être mieux que ce que j’ai vécu ici bas. Là, je ne dis pas non malgré tout, parce qu’évidemment si c’est pire ou même si c’est pareil, si c’est aussi dur qu’aura été ma vie, alors je préfère de loin le sommeil éternel. Car pour rien au monde, je n’accepterais de revenir au monde dans ce monde-là, bien trop dur à mon goût même si d’aucuns pourraient me dire qu’il l’est encore plus pour d’autres, auquel cas loin de m’en réconforter je trouverais désolant que cela aurait pu l’être davantage encore, malgré qu’on m’ait dit une fois « si c’était moins dur, ce serait aussi moins drôle ». Sauf que bof, moi la dureté de ce monde ne m’amuse guère, même si un peu de difficulté, je veux bien l’admettre peut en effet être stimulant, mais trop, moi, ça ne me fait plus rire du tout. Alors si sommeil éternel il devait y avoir, je le souhaite par dessus tout sans rêves, car ayant assez souvent expérimenté l’ironie du sort de mon vivant, ces rêves, hélas, risqueraient bien trop de se transformer très vite en cauchemars.

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